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Un mot sur moi

 

Quand j’ai commencé de peindre c’était pour quelques jours ou quelques semaines. J’ai continué pendant plus

de trente ans. J’expose rarement. Je peins chaque jour. On demande souvent aux artistes, aux peintres ou aux

écrivains, quand et comment s’est décidée leur pratique. Comment est-ce arrivé ? Mais rien n’est arrivé. La

première peinture est là depuis toujours, elle attend en vous et dès que la voie est libre, elle s’installe, elle

prend sa place, laissée vacante.

Adolescent, je me voulais scientifique. Toutefois, je m’étais autorisé à peindre à la condition de connaître les

lois, les théories, au moins une théorie, capable de régler ma pratique. Dans un petit livre de Paul Klee

j’étudiai alors les dessins, les équilibres et les formes, le tout expliqué par Klee, lui-même. Et puis les couleurs,

la température de chacune d’elles estimée par Kandinsky. Je fus secrètement déçu par cette rigueur obscure

et je cessai d’inquiéter l’entourage avec mes réalisations « abstraites ».

Après avoir fait un grand tour par la science, par l’étude de la médecine, je retournai à la peinture. Mais libre

cette fois, seulement tenu par la passion de faire apparaitre sur la toile, un événement, un phénomène, une

Chose.

 

Alors se sont succédés des paysages, le plus souvent fréquentés par des

figures que j’appelais des « Figurants ». Je voyais dans la peinture, dans

les accidents de la matière et des couleurs, les indices de leur existence à

venir. (Je pensais aux œuvres de Bacon, j’aimais l’ironie savante de ses

hasards corrigés). Mais, ces Figurants finirent par acquérir le poids du

réalisme. Les toiles m’entouraient, ces créatures étaient là, je leur donnais

des noms que je gardais pour moi.

Et vint le jour où, tandis que je peignais une surface qui devait soutenir la

déambulation d’un couple de Figurants, j’ai regretté la présence de ces

gens qui empêchaient la peinture de s’étendre et d’aller à son terme.

Alors j’ai procédé autrement, j’ai congédié les figures pour peindre et dessiner en long et en large, en forçant

les matériaux, pigments, acrylique ou fusain, à se constituer en fragments - en tableaux - accordés au Monde.

On parle alors de peinture non figurative, et on ajoute abstraite, ce qui peut sembler paradoxal.

Mais cette liberté trouvée n’est ni une solution ni une contrainte, et je peux toujours laisser apparaitre des

arbres ou des personnages - s’ils me le demandent.

La ligne de ma peinture ?

Un ami, un peintre, un professeur, Jacky Chriqui, me fit un jour le cadeau d’une remarque essentielle : ta

peinture, finalement, c’est une peinture d’Apparition. Plus récemment, Lydie Arickx m’invita à partager

une exposition que j’ai proposé de nommer : Les Apparaîtres.

La peinture montre que le Monde est un phénomène qui ne cesse pas d’Apparaître. Ce verbe est à la fois

une source et un projet.

Alain Gillis avril 2023

 

Publications :

- Peinture d’Origine,. Ed Adam Biro , Paris, 1994.

- Le Bazar du Génie, Ed Adam Biro, Paris, 2003.

- L’Enfant Grave, Ed Chambre d’Echos, Paris, 2005.

- Java Opéra, Ed Grasset , Paris, 2007.

Expositions :

1987. Figures I. Espace François Lévy. Paris.

1989. Figures II. Galerie 43. Paris.

1997. Le Vraisemblable. Société de psychanalyse freudienne. Paris.

2002. Les Figurants. Galerie sur cour. Paris.

2013. Les Apparaîtres. en duo avec Lydie Arickx. Chapelle Sainte Anne. Tours.

2017. Exposition La Note Noire. Unterfahrt. Munich.

2023. Exposition peintures et fusains. Galerie Etienne de Causans. Paris

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